234 HISTOIRE DE LA FRANCE ET DE L’EUROPE
mentations. Voici quelques extraits de leurs memoires ; ils
sont accablants pour Louis XIV, dont les constructions, les
guerres et V’intolerance Gtaient cause de toute cette misere *
« Dans Ja generalite de Rouen, dans Ia Normandie qui fut toujours
une des provinces les plus laborieuses et les plus aisces, SUr
700.000 Ames, il n’y en a pas 50.000 qui mangent du pain & leur
aise et qui couchent autrement que sur la paille.
« La generalite de la Rochelle a perdu un tiers de ses habitants
par diverses causes, entre autres par Ja misere, Les paysans sont
obliges de se priver d’une partie de la nourriture n&cessaire. Ils
meurent avant l’äge, parce que la moindre maladie detruit aise-
mentdes corps consommes d’inanition et de souffrance...
« Les paysans de a generalite de Moulins sont noirs, livides et
presque hideux ; ils se nourrissent de chätaignes et de raves comme
leurs bestiaux.
« Dans la generalite de Riom, le paysan boit de F’huile de noix:
C’est presque sa seule nourriture, ce qui est etonnant, vu que C®
pays est d’ailleurs si abondant ; mais les impositions dont les peu-
ples sont charges ne leur permettent pas de jouir des biens natu-
rels de leur patrie. »
« Dans le Dauphine, misere generale. » (etc.)
La misere au XVIIK sieele. — 1707, Avec les inva-
sions qui marquent les dernieres annees du r6gne de
Louis XIV, la misere s’accroit encore. Voici le temoignage®
de Vauban:
«La dixieme partie du‘ peuple est reduite ä la mendicit@ ef
mendie effectivement (soit 2 millions de mendiants sur un peuple
de 20.000.000) ; des neuf autres parties, il y en a 5 qui ne sont pa$
en etat de faire Paumöne & celle-la, parce qu'elles-mömes en sont
reduites, & tres peude choses pres, & cette malheureuse condition ;
des quatre autres parties qui restent, trois sont fort malaisees. »
Vers le meme temps, l’eveque Fenelon &crit « au grand
ro1»!
« La France entieren’est plus qu'un grand höpital desol& et sans
provision. »
1795. Extrait d’une lettre du duc de Saint-Simon :
« Les pauvres gens de Normandie mangent de l’herbe et le
royaume se tourne en un vaste höpital de mourants et de deses”
peres, »