LE GOUVERNEMENT DE LOUIS-PHILIPPE.
Vers neuf heures une bande arrivait devant le Minis-
tere des Affaires Etrangeres, situe alors boulevard
des Capucines. Par prudence, le Ministere, oU habi-
tait Guizot, etait garde par un cordon d’infanterie. Un
coup de feu tire du milieu des manifestants abattit un soldat.
Sans commandement, d’un mouvement spontane, les fantassins
riposterent presque a bout portant': ja decharge jeta par terre
trente-cinq morts et une cinquantaine de blesses.
Tandis que la foule s’enfuyait epouvantee, quelques manifes-
tants s’emparaient d’une charrette a bagages, y chargeaient
seize cadavres, parmi lesquels bien en vue, celui d’une jeune
femme dont la poitrine etait couverte de sang. Puis en cortege,
A la lueur des torches, on remonta les boulevards, et pendant une
grande partie de la nuit on promena les cadavres ä travers les
rues, en appelant le peuple aux armes. Le jeudi matin 24, Paris
Gtait herisse de barricades et l’on criait partout : « Vive la Repu-
blique ».
359
CATASTROPHE
DU BOULEVARD
DES CAPUCINES
Pour faire face A Vinsurrection, le gouvernement, au
CHUTIE dire du marechal Bugeaud, commandant en chef, n’a-
VERS PPE vait que des soldats Epuises « tenus depuis soixante
heures sac au dos, les pieds dans la boue froide, avec
seulement 1rois rations de biscuit.... La plupart n’avaient pas
dix cartouches ». D’autre part le gouvernement tätonna. Thiers
proposa d’evacuer Paris pour y rentrer ensuite de vivc force: le
roi refusa. On decida: alors, dans l’espoir d’apaiser les insurges,
de retirer les troupes et de confier le service d’ordre ä la garde
nationale. Dans leur mouvement de retraite, les regiments qui
Occupaient les boulevards, noyes dans la masse des manifes-
tants, furent coupes en tout sens et mirent la crosse en lVair
sans combat. Aux Tuileries, apres dejeuner, le roi monta ä
cheval pour passer en revue quelques troupes et des gardes
nationaux reunis dans la cour du Carrousel. A peine apparut-il
qu'il fut salue du cri de : « Vive la Reforme ». Il rentra aussi-
töt decaurage.
Cependant les.insurges avancaient sur les Tuileries ; ils
£taient deja maitres du Palais-Royal et la fusillade crepitait tout
pres du Carrousel. Alors, dans l’espoir de sauver la dynastie,
puisque le roi 6tait perdu, quelques personnes, dont un de ‘ses
fils, presserent Louis-Fhilippe d’abdiquer. A midi et demi il
signa un acte d’abdicalion en faveur de son petit-fils le comte