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Le Paysan. — Des faineants ! de mauvais ouvriers !
Le Soc. — Non point! des ouvriers renvoyes en bloc, bons
et mauvais, parce qu'il y a une crise fatale, que personne n’a
Pu prevoir, Les crises industrielles s’abattent sur les bons
comme sur les mauvais, aveuglement. Est-ce que dans les
campagnes, la grele et les gelees epargnent plus le paysan
laborieux que le paresseux ?
Le Paysan. — Puisque vous allez par 1ä, comptez aussi les
greves comme des causes de pertes de forces.
Le Soc. — Certainement! et des pertes enormes!
Le Paysan, — Cest de la faute des ouvriers, s’il y a des
greves, ils ne sont jamais contents !
Le Soc. — Il ne s’agit pas de rechercher, en ce moment,
qui est responsable des greves, des patrons ou des ouvriers:
Pour moi, ce ne sont pas plus les uns que les autres; les gröves
sont amen&es fatalement par le conflit entre le capital qui
veut avoir la plus grosse part possible et le travail qui, de
Son cöte, reclame fes meilleures conditions possibles, Les
greves sont le resultat d’un conflit d’interets qui est Aa la base
meme de notre societe de libre concurrence. Et cela est si
vrai que ce n’est pas seulement dans une corporation, mais
dans toutes, pas seulement dans un pays, mals dans tous —
quelle que soit la forme de gouvernement — que nous voyons
les greves eEclater sans cesse plus etendues et plus graves; en-
trainant a leur snite des pertes colossales, |
Le Paysan. — Si on laissait (aire vos grevistes, ce serait
bien pire encore; car ils briseraieni tout, comme des fous
furieux, si ’armee n’etait pas 1A pour les tenir en respect,
Le Soc. — Vous venez de nommer une belle source de gas-
ilage de forces, l’armee permanente! Qui, VOUS avez raison,
Parmee permanente c’est le chien de garde indispensable de
notre societe de libre concurrence et de proprieie individuelle,
Tant que la grande industrie produira d’une facon dereglee,
mettant aux prises aux colonies les capitalistes des diffe.
rentes nalions en quete de debouches, il faudra des armees
coloniales et des arm6es metropolitaines nombreuses, car
une guerrre est toujours a craindre ä propos de dehcuches
coloniaux. .
Et tant que dans les centres industriels les instruments de
travail seront aux mains de Compagnies richissimes, tant que
des milliers et des milliers de travailleurs manuels seront
comme les serfs taillables et corveables de ces Compagnies,
il faudra une solide armee permanente, un formidable chien
de garde, pour doubler la gendarmerie. .
Chömages, greves, armees permanentes, voilä ce que coüte,
en frais generanx, la grande industrie actuelle, en regime de
propriete individuelle et de libre concurrence. .
Le Paysan. — N’empeche que si on liceneciait les 700.000
hommes de l’arm6e permanente et de Ja marine de guerre,