LA FEODALITE.
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Beaucoup de soldats ensemble gronder;
üt j’ai grande allegresse,
Quand je vois forts chäteaux assieges,
Et murs crouler et deracine6s,
Et que je vois arme sur le rivage
Qui est tout a l’entour clos de fosses
Avec des palissades de forts pieux ferm&s.
Lances, 6pees, heaumes de couleur,
Ecus percer et degarnir
Nous verrons ä l’entree du combat,
Et maints vassaux ensemble frapper,
D’ot iront 4 l’aventure
Chevaux des morts et des bless6s;
Et lorsque le combhat sera m6le,
Qu'aucun homme de haut parage
Ne pense qua fendre letes et bras,
Yu que mieux vyaut mort que vif vaincu.
je vous dis que tant ne m'a saveur
Manger ni boire ni dormir,
Comme & quand jP’entends crier : A euz!
Des deux parts; et que j’entends hennir
Chevaux demontes par la for6t,
Et que jentends crier : Aidez! Aidez!
Et que Je vois tomber dans les fosses
Petits et grands sur l’herbe,
Et que je vois les morts qui par les flancs
Int les troncons oulre-nasses.
Voyant qu’il etait impossible de faire renoncer la noblesse ä ce quelle
considerait comme le premier de tous les plaisirs terresires, V’Eglise usa
avec eile de temperament. Elle lui accorda trois jours dans la semaine
pour vider ses querelles et Echanger des coups, Puisque rien ne pouvait
°almer cette ardeur belliqueuse, mieux valait lui donner un derivatif que
Tattendre awelle fit rage. La naix de Dieu fut changee en Ereve de Dieu.
La tröve de Dieu, — « Il fut ordonn6 que, depuis le
Mercredi soir jusqu'au matin du lundi‘ suivant‘, personne
n’eüt la t6merit& de ne rien enlever par la violence ou de satis-
faire quelque vengeance particuliere. Celui qui oserait violer ce
4. La tröve de Dieu fut encore 6tendue aux jours de fäte, & l’avent, au caröme,
le sorte qu'il ne resta plus que soirante ou Gunfrg vingdt jours par ann6e oU
"appel ä la force fut permis. Les 6glises, les cimetieres, les laboureurs avec leurs
oulils et leurs bestiaux, ceux möme qui se refugiaient pres des charrues. furent
MiIs sous la sauverarde pernetuelle de la träve de Dieu.